Burkina Faso - Sanctions demandées contre l'industrie du tabac pour non-respect de la loi

Ces compagnies défient ouvertement les autorités du pays en s’opposant à leur volonté de protéger la population contre les effets délétères du tabagisme. Elles foulent au pied la loi décidée souverainement par notre parlement et notre gouvernement.

L’ONG ACONTA (Afrique contre le tabac) et les organisations de la société civile partenaires, dont l'OTAF, ont organisé le 7 avril dernier une conférence de presse pour alerter l’opinion publique nationale et internationale et les autorités gouvernementales et judiciaires du Burkina Faso sur le non-respect de la loi par l’industrie du tabac, exiger l'application immédiate de la loi, et demander des sanctions sévères contre les contrevenants.

Nous reproduisons ci-dessous dans son intégralité le texte de la déclaration liminaire qui a été faite lors de cet événement.

Déclaration liminaire de la conférence de presse relative à l’application de la loi antitabac au Burkina Faso

Jeudi 7 avril 2016

Mesdames et Messieurs,

L’ONG ACONTA (Afrique contre le tabac) et les organisations de la société civile partenaires organisent la présente conférence de presse pour alerter l’opinion publique nationale et internationale et les autorités gouvernementales et judiciaires du Burkina Faso sur le non-respect de la loi par l’industrie du tabac, pour exiger que la loi soit immédiatement respectée et demander des sanctions sévères contre les contrevenants.

Le tabac tue. Il tue 6 millions de personnes par an dans le monde (OMS). Il tue au Burkina Faso environ deux milliers de personnes par an.

Pour protéger la santé des millions de Burkinabè contre les effets dévastateurs du tabac, les autorités ont mis en place une législation antitabac, dont notamment :

  • la Loi N° 040-2010/AN portant lutte contre le tabac au Burkina Faso, adoptée en novembre 2010 ;

  • le Décret N° 2011-1051/PRES/PM/MS/MEF portant conditionnement et étiquetage des produits du tabac au Burkina Faso, du 30 décembre 2011 ;

  • l’Arrêté conjoint n° 2015-366 /MS/MICA (conditionnement et étiquetage des produits du tabac) du 7 avril 2015.

Dans la dynamique de mise en application de la loi antitabac, le Burkina Faso a adopté un décret relatif au conditionnement et étiquetage des produits du tabac et, un peu plus de deux ans plus tard, un arrêté mettant en application lesdits avertissements sanitaires. Il est important de préciser que ces avertissements sont destinés à apposer des images choc traduisant de façon réaliste les conséquences du tabac sur la santé. Ces images sont à mettre sur tous les paquets, cartouches et cartons de cigarettes pour sensibiliser les populations Burkinabè. Selon les termes de cet arrêté, les sociétés de production et d’importation des produits de tabac avaient un délai maximum d’un an pour se conformer à l’arrêté en apposant les images sur tous les emballages de cigarettes. Ce délai expire aujourd’hui, le 7 avril 2016.

Non-respect de la loi par les industriels du tabac

Force est de constater que les compagnies de tabac et leurs distributeurs ne respectent pas la loi et continuent de vendre leurs produits dans les anciens emballages. Ce faisant, ces compagnies défient ouvertement les autorités du pays en s’opposant à leur volonté de protéger la population contre les effets délétères du tabagisme. Elles foulent au pied la loi décidée souverainement par notre parlement et notre gouvernement, qui pourtant n’a fait que de transposer dans la loi nationale les obligations légales internationales issues du traité de l’OMS, la Convention-cadre pour la lutte antitabac (CCLAT), ratifié par le Burkina Faso en juillet 2006, il y a bientôt dix ans.

Par exemple, en Grande Bretagne la multinationale britannique Imperial Tobacco doit se soumettre très strictement à la décision du gouvernement d’introduire le paquet neutre, alors que cette compagnie se comporte ici en hors-la-loi en agissant comme si elle se moquait éperdument de la législation Burkinabé. Législation, est-il besoin de le rappeler, souverainement et unanimement adoptée par les parlementaires de notre pays en 2010 et dont les modalités d’application ont été clairement définies par notre gouvernement.

C’est donc un fait : les compagnies de tabac qui opèrent au Burkina Faso violent de façon flagrante les dispositions relatives au conditionnement et à l’étiquetage du tabac et des produits du tabac conformément aux dispositions de la Loi N° 040-2010/AN du 25 novembre 2010, du décret le Décret N° 2011-1051/PRES/PM/MS/MEF du 30 décembre 2011 et de l’Arrêté conjoint n° 2015-366 /MS/MICA du 7 avril 2015, au sens de l’Article 40 de la loi précitée. Ces compagnies, en tant que personnes morales, et leurs responsables, en tant que personnes physiques, tombent donc sous le coup des sanctions pénales prévues à l’Article 40 de la loi, qui prévoit une peine d’emprisonnement de un à six mois et une amende de un million de francs CFA à cinq millions de francs CFA.

Mesdames et Messieurs,

C’est une situation inacceptable et inadmissible.

De gauche à droite :
Kiguin Débé, responsable de la lutte contre le tabagisme
au ministère de la Santé, Salif Nikièma, SG de l’ONG Aconta,
et Mohamed Mohamed Ould Sidi, président de l'OTAF

Nous sommes devant un grand défi qu’il faut relever afin de protéger la santé de la population du Burkina Faso contre les agissements d’une industrie prédatrice. Il faut prémunir notre système législatif contre des compagnies multinationales qui se croient au-dessus des lois de notre pays et se moquent de ses décideurs politiques. Le Président du Faso, Son Excellence Rock Marc Christian Kaboré a récemment promis de mieux protéger la population par « le durcissement de la règlementation sur la production, la commercialisation et la consommation de produits dangereux pour la santé (alcools, drogues, tabac) ». La situation actuelle offre une opportunité d’illustrer cette promesse de façon exemplaire en sévissant durement contre ceux qui violent la loi et mettent la santé publique en péril.

C’est pourquoi, en ce jour du 7 avril, date limite de mise sur les marchés de nouveaux paquets de cigarettes fixée par l’arrêté n° 2015-366 /MS/MICA et de surcroît, Journée Mondiale de la Santé célébrée dans le Monde entier, les organisations ci-après dénommées :

  • Afrique contre le tabac (ACONTA) basée à Ouagadougou ;

  • le Réseau des journalistes pour la lutte antitabac au Burkina Faso (REJAT-BF) basée à Ouagadougou ;

  • l’Observatoire du tabac en Afrique francophone (OTAF) basée à Niamey ;

  1. félicitons et encourageons le Gouvernement et le Ministère de la santé pour sa détermination à protéger la santé des populations et à lutter contre le tabagisme, en remplissant ainsi les obligations légales issues de la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac ;

  2. appelons le Procureur du Burkina Faso à ouvrir une enquête pénale contre les compagnies de tabac contrevenantes et leurs responsables, et, le cas échéant, de les traduire en justice, en demandant que leur soit infligées les amendes maximales prévues à l’Article 40 et, aux personnes physiques, les peines de six mois d’emprisonnement, à titre exemplaire et au vu des innombrables tragédies humaines qu’entraînent la consommation de leur produit, consommation que la loi a pour objectif de réduire, et au vu des tentatives répétées de compagnies de tabac de saboter la politique de santé publique du pays, par la désinformation systématique et en s’ingérant dans les processus décisionnels à tous les niveaux ;

  3. appelons les autorités gouvernementales compétentes à interdire, avec effet immédiat, aux compagnies de tabac de livrer aux distributeurs et aux revendeurs les anciens paquets de cigarettes, non conformes à l’Arrêté conjoint n° 2015-366 /MS/MICA, qui sont, à partir d’aujourd’hui, illégaux, et à considérer toute vente de ce type de paquet comme une récidive, ce qui constitue une circonstance aggravante pour l’application des sanctions prévues ;

  4. appelons ces mêmes autorités à obliger les compagnies de tabac, les distributeurs et les revendeurs, à se mettre immédiatement en règle avec la loi, en ne vendant que des paquets dont les emballages sont conformes à l’Arrêté conjoint n° 2015-366 /MS/MICA, sous peine de l’application des sanctions prévues à l’Article 40 précité aggravée par la récidive ;

  5. appelons les autres structures et réseaux de lutte antitabac et de promotion de la santé, à se joindre à nous pour faire respecter la loi de façon exemplaire, en signifiant clairement aux multinationales du tabac, et aux sociétés qui leur servent de relais, qu’elles ne sont pas au-dessus de lois et qu’elles ne peuvent pas impunément violer la loi du Burkina Faso et afficher ainsi leur mépris pour les institution démocratiques de notre pays.

Fait à Ougadougou, le 7 avril 2016

 

Document : Communiqué de presse (PDF)

Revue de presse

 


2016.04.16/pad

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